Dans cette interview, Camille nous raconte son combat face à son émétophobie ou peur de vomir (voir l’article correspondant).

Elle nous explique ses difficultés et ce qu’elle a fait pour retrouver une vie normale aujourd’hui.

Bonne lecture.

Sylvain : Bonjour à tous ! Aujourd’hui nous allons parler de crises d’angoisse et d’émétophobie plus particulièrement.

Et nous avons une invitée, je suis avec Camille. Bonjour Camille.

Camille : Bonjour !

S : Alors pour commencer, est-ce que tu pourrais nous parler d’où tu viens ? Et de ce que tu fais dans la vie ?

C : Alors je vais avoir 25 ans cette année, et maintenant je suis chargée du recrutement. J’ai terminé mon parcours scolaire l’année dernière, qui a été pas mal perturbé par mes crises d’angoisse, ma phobie scolaire et tout ça était dû à mon émétophobie.

S : D’accord. Est-ce que tu peux nous raconter la première fois que tu as ressenti l’émétophobie ? Donc la phobie de vomir pour ceux qui ne connaissent pas.

C : Le plus loin que je puisse me souvenir, j’ai l’impression que ça a toujours été présent, mais il y a vraiment une fois particulièrement où je me rappelle comme étant la première fois où ça m’a vraiment angoissée. C’était en primaire, en fait j’avais vomi à l’école sur ma table et c’est vraiment à partir de là que ça m’a vraiment angoissée nuit et jour, je me suis mise à y penser tout le temps.

S : D’accord et est-ce que tu peux nous décrire ce que tu ressentais quand tu avais toute cette angoisse de vomir ?

C : En fait c’est un cercle vicieux. Parce que à partir du moment où je me mets à penser à l’idée de vomir je me crée toute seule des symptômes, des nausées etc. Ce qui amplifie le fait que j’ai peur de vomir, amplifie les symptômes et ensuite j’ai mon cœur qui bat de plus en plus fort. En général j’ai très très chaud et puis je commence à perdre un peu mes repères, j’ai un peu du mal à savoir où est-ce que je suis. Si il y a du bruit autour, ça devient un brouhaha ou pire. Tout devient très confus et le cercle vicieux fait que je n’arrive pas moi-même à arrêter tout cela.

émétophobie restaurant

S : Et du coup ça peut aller jusqu’à la crise d’angoisse ?

C : Ah oui oui ! Aujourd’hui ça m’arrive quasiment plus parce que j’ai vraiment appris à me rendre compte que c’est dans ma tête et que je crée toute seule les symptômes. Donc j’arrive me persuader et me rendre compte que ce n’est pas réel. Mais par contre avant quand je ne savais pas autant me contrôler oui ça allait jusqu’à la crise d’angoisse. Je ne pouvais plus respirer. Il fallait que je sorte absolument de l’endroit où j’étais, et parfois ça peut mettre plusieurs heures à passer.

S : Tu as eu des crises d’angoisse qui pouvaient durer plusieurs heures carrément ?

C : Oui oui, particulièrement la nuit, je faisais des nuits blanches entières parce que j’avais peur de m’endormir. Parce que j’avais peur de me réveiller en étant malade.

S : D’accord. Ah oui c’est très long des angoisses comme ça…
Et toute cette période difficile a duré combien de temps ? Plusieurs années ? Tu as des pauses ?

C : Non, mon émétophobie n’est jamais partie, aujourd’hui elle est toujours là simplement j’ai appris à faire avec. Mais les années les plus difficiles ça a été à partir de la 5ème à il y a deux ans. Donc huit ans à peu près où ça a été très difficile.

S : Huit ans, d’accord c’est très long. Et est-ce que c’était à peu près toujours pareil où il y a eu des périodes qui étaient plus dures que d’autres ou est-ce que tu as eu des moments de répit quand même ?

C : De répit complet non, ce n’est jamais parti. Disons que j’ai maintenant accepté que ça ne partira pas, mais il y a eu des moments pires par exemple l’hiver pendant les épidémies de gastro, là j’y pensais encore plus. Pareil quand il y avait quelqu’un de mon entourage qui était malade. Là ça augmentait vraiment à fond mon angoisse et là j’y pensais presque à chaque minute de la journée.

S : D’accord. Et pour cette émétophobie l’élément déclencheur ça a été le moment où tu as vomi en classe au tout début ?

C : Pour moi, dans mon conscient c’est ça. Après, vu que je n’arrive pas vraiment à me souvenir quand c’est apparu, j’ai fait pas mal de thérapies différentes et il se peut que ce soit aussi quelque chose dont je ne sois pas forcément consciente qui a engendré ça. Parce que même petite j’ai toujours eu des difficultés pour manger, tout ce qui était en rapport avec la nourriture et le fait d’avaler, ça a toujours été un peu compliqué même quand j’étais petite. Donc dans mon conscient c’est ça. Mais il se peut que ça vienne de plus loin et je ne sais pas vraiment.

S : Ok, et donc après cet événement, est-ce que tu pourrais nous décrire, enfin tu nous as déjà mentionné des phobies sociale et scolaire qui se sont développées, mais en plus de ça comment est-ce que ton quotidien a vraiment changé entre le moment avant l’émétophobie et le moment où tu l’as eue ?

C : En bien tout était complètement changé puisque partout où j’allais et même encore aujourd’hui la première question que je me pose c’est : “Où est-ce que je peux sortir ? Où sont les toilettes ? Combien de temps ça va durer ?” Encore aujourd’hui c’est presque un réflexe. C’est toute une façon de penser et d’organiser mes journées et ce que je fais qui a changé. Maintenant ça va mieux mais il y a eu une période où je ne pouvais absolument pas aller même à un anniversaire de quelqu’un puisqu’il y avait plus de dix personnes. Je fais très très attention à ce que je mange. Je n’ai jamais mangé quelque chose qui était périmée ou quelque chose qui ne me plaît pas. Quand j’ai un doute, que je ne sais pas d’où ça vient, même dans les restaurants je regarde toujours les avis avant d’y aller…
Aujourd’hui ça ne me pose pas vraiment de problème mais quand j’étais par exemple à l’école à la cantine j’avais toujours hyper peur de manger. Du coup je mangeais rien parce que j’avais peur. À un moment j’arrivais même plus à rester à table avec ma famille parce que j’arrivais même pas à manger si quelqu’un était assis à côté de moi. Et puis toutes les nuits blanches que j’ai passées à m’empêcher de dormir tellement j’avais peur d’être malade la nuit. Donc oui ça m’a quand même bien changé.

S : D’accord. Et quand tu dis que tu ne pouvais pas aller à un anniversaire parce qu’il y avait trop de gens ou qu’il y avait une personne à côté de toi et que tu ne pouvais pas manger, c’est parce que tu avais peur de vomir devant ces personnes ou alors c’était dû à la phobie sociale ?

C : Oui c’est ça, en fait c’est vraiment que j’avais peur d’être malade et que quelqu’un soit là. Et du coup les seuls moments où j’étais rassurée c’était vraiment avec mes parents, mes frères, les gens très très proches. Mais il y a eu une période où même avec mes amis c’était compliqué pour moi de passer du temps avec eux parce que j’étais obsédée tout le temps par cette idée là d’être malade et qu’ils puissent me voir. Tout ça n’existe plus aujourd’hui mais ça a été à ce point.

S : Et c’était la peur du regard des autres ?

C : Oui, oui et puis maintenant que j’ai pu avancer un peu dans mon cheminement, je pense que c’est aussi la peur de perdre le contrôle parce que c’est vrai que quand on vomit on ne peut pas du tout s’empêcher, on ne peut rien faire contre ça et prendre le contrôle avec des gens autour de moi, c’est quelque chose qui m’angoisse.

S : D’accord et c’est ça que tu appelais ta phobie sociale ? C’est comme ça qu’elle est apparue ?

C : C’est ça ! Exactement, et la phobie scolaire c’est pareil en fait j’avais juste tellement peur de vomir à nouveau en classe que c’est allé au stade où je ne pouvais même plus rentrer dans mon collège. C’était impossible !

S : Ah oui, et tu es restée bloquée comme ça hors de l’école pendant combien de temps ?

C : Une année scolaire. J’ai été d’abord dans un centre pour les troubles d’adolescents pendant quelques mois. Et après j’ai fini en cours par correspondance l’année scolaire. Je suis restée, pas déscolarisée mais en dehors de l’école physique pendant une année scolaire et après j’y suis retournée. Mais en y retournant je devais sortir quasiment à chaque heure de cours. Et parfois je passais la journée entière dans la salle sans pouvoir mettre un pied dehors, et ça a duré deux ans comme ça.

phobie de vomir phobie scolaire

S : D’accord. Et après tout ça, comment est-ce que tu as fait pour t’en sortir ?

C : Ben j’ai toujours continué, et ma maman a toujours été très… enfin sur le moment ça a été très difficile parce qu’elle n’a pas été très compréhensive, elle m’a toujours un peu obligée, elle ne m’a jamais trop laissé de répit et aujourd’hui je suis contente qu’elle l’ait fait parce que sur le moment c’était vraiment difficile, mais je pense que c’est aussi parce qu’elle m’a obligée que j’ai pu continuer ma vie quoi, j’ai pu aller à l’école, je passais des fois des journées à pleurer à l’école mais au moins j’y étais. J’ai pu continuer sans redoubler, j’ai réussi à mon école de commerce l’année dernière, il y a 6 ans personne ne l’aurait cru ! rires.

S : Super !

C : Et je pense que c’est le fait qu’elle ne m’a jamais lâchée, jamais laissé sombrer toute seule. Elle n’a jamais pu me laisser aller même si ça allait pas, même si je pleurais toute la journée, ben il fallait quand même que je me force, que j’y aille. Je me suis vraiment forcée pendant deux ans, c’était horrible, et force de faire des efforts et de m’obliger, et bien petit à petit j’ai réussi à prendre sur moi. Et chaque année scolaire était un peu moins pire. Quand je suis arrivée en terminale c’était quasiment normal.

S : Ok. Donc c’est le fait de persévérer à vivre ta vie de tous les jours qui t’a lentement et difficilement sorti de ta situation, d’accord.

C : Même encore aujourd’hui, de mettre un pied en dehors de chez moi c’est un effort, mais par contre je ne m’autorise même pas à penser à l’idée de rester chez moi. Parce que je sais qu’on retombe super vite dans le cercle rassurant et du coup on a encore plus envie de rester chez soi, ça ne s’arrête jamais.

S : Et tu nous disais que tu avais essayé différentes thérapies ?

C : Oui. J’ai fait une thérapie classique avec un psychologue pendant sept ans. ça m’a beaucoup aidé pour comprendre le fonctionnement de tout ça. C’est vrai que j’étais jeune. Et après ce qui à mon sens était un grand pas en avant c’était l’EMDR. La reprogrammation par mouvements des yeux. Là j’ai revécu des traumatismes et appris à les voir non plus comme des traumatismes mais comme de simples événements. Et j’ai vraiment eu un avant après en sept séances. Je ne vais pas dire que c’est parti, c’est pas parti, mais ça a vraiment changé quelque chose dans ma façon d’appréhender les choses.

S : Très intéressant. Alors l’EMDR c’est une thérapie qui n’est pas très connue, ça t’a beaucoup soulagée assez rapidement c’est ça ?

C : Ah oui ! Vraiment. J’ai fait sept séances, il y avait quinze jours entre chaque. Alors c’est éprouvant, en tout cas pour moi parce qu’on doit revivre absolument toutes les sensations… Mais il y a vraiment eu un avant/après.
C’est comme si on atténuait les traumatismes. Ils sont là, mais ça m’angoisse beaucoup moins les pensées.

S : Et est-ce que c’est des soins qui sont remboursés par la sécu ? Est-ce que c’est cher ?

C : Alors non. Peut-être pour certaines pathologies mais pour moi non. Ni la psychothérapie d’ailleurs parce qu’il faut passer par un psychiatre pour être remboursé et moi j’avais un psychologue. C’était 50 euros par séance. Il y avait une période où j’y allais deux fois par semaine.
Et pour ce qui est de l’EMDR, c’était 90 euros la séance et j’en ai fait sept. Donc oui par contre j’ai choisi d’investir dans le fait d’aller mieux, mais après je pense que c’est un choix propre à chacun. Moi j’ai essayé plusieurs choses, même plusieurs thérapeutes d’ailleurs. Dans l’EMDR j’en avais déjà fait avec un autre plusieurs années en arrière et ça n’avait absolument rien fait. Donc je ne sais pas non plus si moi même j’étais prête il y a quelques années. Parce que mon émétophobie fait tellement partie de moi que j’ai presque peur de ne plus avoir peur.

S : Je vois ce que tu veux dire.

C : Voilà ça rythme tellement toute ma vie, que j’ai l’impression qu’il va me manquer quelque chose si on me l’enlève. Donc je pense qu’il faut avoir déjà fait un cheminement et avoir de la volonté pour que ça fonctionne.

S : Effectivement, j’ai entendu plusieurs personnes parler de l’EMDR et ça dépend vraiment de chacun et des situations. Pour certains ça va être magique, ils vont perdre leur phobie en très peu de temps et pour d’autres par contre ça peut soulager un peu mais sans plus.

C : C’est ça. Et puis je pense qu’il ne faut pas avoir d’attente. Je n’ai jamais cherché ce qui avait changé. J’ai senti à un moment donné que c’était beaucoup plus simple pour moi de faire avec, mais j’ai pas cherché après chaque séance à me demander si telle ou telle chose avait changé. C’est vraiment quelque chose de global, je me sens plus sereine et j’ai l’impression que j’ai beaucoup plus de facilités à faire avec. Mais je n’en ai rien attendu, je pense que des fois on en attend trop, c’est là qu’on est déçu et on a l’impression que jamais ça va s’en aller et je pense que c’est un vrai cercle vicieux mental.

S : Alors justement, tu anticipes ma prochaine question : Depuis les moments où tu vas mieux, est-ce que ta façon de penser a changé ?
Est-ce que tu avais des mauvaises pensées que tu avais avant et que tu n’as plus ?
Comment as-tu réussi à travailler tout ça ?

C : Ah oui oui complètement, parce que l’année où mon émétophobie avait pris complètement le dessus, que c’était le centre de ma vie, je ne pensais qu’à ça, là c’était très difficile, j’ai eu envie de mourir jusqu’à 17-18 ans. J’avais l’impression que je n’allais jamais réussir à reprendre le dessus et que ma vie entière allait toujours être guidée par ça. J’arrivais à vivre ma vie, parce que je me forçais, mais je ne voyais pas comment un jour ça ne serait pas un effort de vivre. Ça a été pour moi un effort de rester là pendant plusieurs années, en plus l’adolescence c’est facile pour personne. Je vivais en me disant “on verra” mais sans grande conviction qu’un jour ça serait bien.
Et c’est vrai que après, petit à petit, ça n’a pas été mieux du jour au lendemain mais à partir du moment où je suis sortie du lycée, rentrée en études supérieures et que j’ai vécue toute seule, j’ai réussi à me rendre compte que déjà je pouvais me forcer toute seule sans ma mère. Et je me suis rendue compte un jour à quel point j’avais quand même eu du courage de tenir comme ça pendant toutes ces années, et de continuer parce que je ne me suis jamais arrêtée de faire quelque chose, jamais laissée aller, jamais eu un traitement médicamenteux. J’ai juste toujours voulu continuer par moi-même, et un jour je me suis dit que quand même je suis beaucoup plus forte et courageuse que ce que je pensais de moi parce que tout ce que j’avais traversé était certainement beaucoup plus dur que ce qui allait arriver. Et petit à petit, toujours à force quand même d’effort, c’est devenu de mieux en mieux et aujourd’hui ma vie n’a rien à voir !
Même si de temps en temps j’ai des angoisses, j’ai accepté le fait que ça fait partie de moi, que peut-être ça ne s’en ira jamais, donc déjà aujourd’hui, je ne suis plus dans la lutte. Je ne suis plus en train d’essayer que ça s’enlève. Je me dit bon ben voilà c’est là. La dessus ma façon de penser a vraiment changé parce que je me suis rendue compte qu’il fallait arrêter de lutter contre les choses de la vie qu’on ne peut pas changer. Et quand on les accepte, ça passe beaucoup plus vite que si on essaye de lutter contre. Donc c’est vrai qu’aujourd’hui toutes les choses, que ce soit au sujet de l’émétophobie ou autre chose, j’ai appris à arrêter de lutter et juste à accepter et tout est beaucoup plus simple comme ça.

S : D’accord, donc en fait c’est mentallement entre le début et maintenant que tu as repris le dessus sur l’émétophobie. Et maintenant, ta phobie existe toujours mais, c’est toi le chef ! rires

C : Oui oui c’est ça ! De temps en temps elle arrive un peu à revenir mais ça dure peut-être un quart d’heure, une demi heure parfois où je n’arrive pas mais mon mental arrive toujours à reprendre le dessus maintenant. Et en plus ça me sert à toutes les choses de la vie. Il y aura toujours dans la vie plein de choses qu’on a pas forcément envie qui se produisent, et le fait d’avoir maintenant ma capacité à accepter au lieu de combattre c’est moins épuisant et en général ça passe encore plus vite.

S : Super. Donc ça c’est pour la façon de penser. Et est-ce que tu as aussi changé des habitudes qui font que tu es moins angoissée entre le début de ton émétophobie et maintenant ?

C : Ce n’est pas vraiment des habitudes, mais j’essaie toujours de faire mieux. Il y a encore aujourd’hui des choses que je ne mange pas. Soit parce qu’une fois j’ai été malade avec, soit parce que ça ne m’inspire pas… Petit à petit j’essaye de me forcer et de prendre sur moi pour les manger. Une fois que c’est fait et qu’il ne s’est rien produit, et bien c’est comme si j’avais gagné un peu de terrain en me disant : “Et ben tu vois, ça, tu peux le faire maintenant !”. Et petit à petit comme ça il y a plein de choses que je m’oblige à faire. Après je me rends compte que si il ne s’est rien produit ce n’est pas si grave. Et aujourd’hui j’ai une vie normale. Si je ne dit pas à quelqu’un que mon émétophobie existe, il ne le sait pas.

C’est pas vraiment des habitudes mais j’essaye toujours d’avancer, je ne me laisse pas me reposer en me disant “bon ben comme ça c’est déjà bien”. Je me dis que c’est bien ce que j’ai fait, mais je peux toujours faire mieux.

S : Oui d’accord, dès que tu peux prendre du terrain sur l’émétophobie tu le fais, même petit à petit et tu ne lâches rien. Génial.

C : C’est ça. Parce que je ne veux surtout pas repartir dans l’autre sens. Si j’avance, je ne peux pas reculer.

S : Oui effectivement. rires. Super.
Tout à l’heure tu parlais de quelque chose qui revient souvent avec les phobies, enfin chez les gens qui ont des phobies pendant très longtemps, ils s’identifient à elles et ça devient comme une partie d’eux mêmes comme tu le disais. Et malheureusement, ces personnes peuvent se mettre à aimer cette phobie, cette partie d’eux même. Et du coup ça devient un frein pour guérir, pour s’en débarrasser. Mais toi à ce que je vois tu l’as acceptée mais tu lui tapes dessus pas mal quand même !

C : Oui. J’accepte juste que ça existe et que ça ne sert à rien de lutter. Parce que j’avance, mais ce n’est pas de la lutte dans le sens où je ne suis plus du tout en colère, où je ne me répète pas chaque jour “il faut que ça s’en aille”. Je me dis “ok elle est là” et quand j’ai l’occasion par contre de lui prendre un peu de terrain je le fais.
Je ne vais pas dire qu’à un moment donné j’ai aimé mon émétophobie. Mais par contre ça a un côté très rassurant pour moi parce que je me dit que tout ce que j’ai mis en place, à cause de mon émétophobie, fait que je suis très rarement malade. Et je me dis, si ma phobie n’est plus là, je vais peut-être faire moins attention et du coup être malade. Et comme mon émétophobie existe toujours, ben ça m’angoisse. C’est vraiment de ce côté là que j’ai peur de perdre, même si c’est un peu paradoxal.

S : Oui c’est très intéressant ce que tu dis. Il n’y a même pas de haine en fait. C’est juste une acceptation complète du phénomène et tu en tires juste le meilleur. Effectivement, la peur de vomir fait que tu prends beaucoup de précautions. Après les excès tu les gommes petit à petit jusqu’à maintenant mais il y a des choses positives, c’est super !

C : Voilà. Oui aujourd’hui j’arrive à me dire que puisque c’est là, et puisque ça m’a construite comme je suis, autant en tirer quelque chose au lieu de juste être pas content, triste, en colère… de toute façon c’est là donc je ne suis pas en colère, j’ai pas envie absolument que ça s’enlève. Tant que je peux vivre ma vie ça me va.

S : OK. Et est-ce que tu aurais un conseil particulier à donner aux gens qui seraient dans ta situation d’il y a quelques années avec une émétophobie très forte ?

C : C’est difficile. Souvent je répète un petit peu dans les groupes, que ce soit pour l’émétophobie ou toutes les autres phobies, ou les dépressions, les choses comme ça… Je sais que c’est vraiment difficile d’entendre ça et je sais que c’est très difficile de le faire et que c’est parfois pas possible mais moi honnêtement ce qui m’a sauvée qui a fait qu’aujourd’hui j’ai réussi, c’est de m’être forcée.

Sur le moment c’était vraiment horrible, je passais mes journées à pleurer, j’était hyper maigre parce que j’arrivais pas à manger, j’étais tellement stressée, voilà ça a été très très difficile. Et je suis quasiment certaine que si ma mère ne m’avait pas forcée et si moi aujourd’hui je ne me force pas, je ne ferai rien. Je me serais laissée submerger. Je sais que c’est très dur à entendre et très dur à mettre en place mais pour moi c’est la seule chose à faire.
Trouver une thérapie, un thérapeute qui nous convienne pour nous aider, mais la solution est en nous-même. Parce que le problème est en nous-même, donc je pense qu’il ne faut pas chercher la solution à l’extérieur. Il faut entre guillemets “se mettre un coup de pied au cul”, ok c’est difficile mais tant pis. Il ne faut pas trop se laisser le choix. En tout cas sur moi c’est ce qui à marché.

S : D’accord. Super. En tout cas Camille merci beaucoup pour ton témoignage ! J’espère qu’il va motiver et redonner espoir à beaucoup de gens qui ont de l’émétophobie ! Parce qu’il n’y a pas beaucoup de chose sur cette phobie très répandue et pourtant mal connue. Donc c’est super sympa.

C : Avec plaisir.

S : Et un message aux personnes qui veulent aller plus loin. Je peux vous envoyer des conseils contre l’anxiété par mail. Voici le lien à suivre.

Voilà. Merci encore Camille, à la prochaine !
Et prenez soin de vous !

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Voir aussi : Comment maîtriser ses Crises d’angoisse sans médicaments, et comment en finir avec l’émétophobie.